30 minutes avec Aymeric César, auto-constructeur en quête d’autonomie : son projet d’autonomie alimentaire et énergétique et son chantier d’habitat écologique inspiré des vikings.
Je m’appelle Aymeric César. Je co-développe une ferme en agriculture vivrière avec pour objectif d’être le plus autonomes possibles.
« Alors j’ai changé, du tout au tout. »
J’ai une formation d’ingénieur informaticien, mais après quelques temps passés en entreprise j’ai bien senti que ce n’était clairement pas ce que je souhaitais faire de ma vie.
Alors j’ai changé, du tout au tout.
Ça va bientôt faire un an et demi que je vis et que je travaille avec mon cousin Robinson et sa copine Yuna sur notre ferme d’agriculture vivrière.
« Notre objectif est d’être aussi autonomes que possible dans plusieurs domaines. »
Notre objectif est d’être aussi autonomes que possible dans plusieurs domaines :
Premièrement sur le plan alimentaire :
- nous avons prioritairement planté des céréales, puis nous nous sommes diversifiés avec l’élevage de poules, de chèvres, de cochons et de vaches. Plus récemment nous nous sommes mis au maraichage de quelques légumes.
- L’élevage est réellement la clé de notre résilience alimentaire, et nous profitons de tous les produits dérivés que nous fabriquons nous même ! Nos fromages sont de plus en plus réussis en tout cas. (rire)
Deuxièmement nous avons fait le choix d’être partiellement autonome sur le plan énergétique :
- Nous utilisons un panneau solaire pour l’électricité, et du bois pour le four à pain.
- Pour cuisiner au quotidien par contre, nous utilisons encore des bonbonnes de gaz.
- Et pour pomper notre eau dans une rivière souterraine, nous utilisons un petit groupe électrogène à essence.
Enfin, nous avons fait le choix de l’auto construction c’est à dire que nous avons décidé de construire nous-même nos logements.
- Puisque nous avons monté notre projet sur un terrain en friche qui appartenait à la famille de Robinson, nous vivons pour le moment dans de vieux mobil-homes.
- Le confort thermique est vraiment inexistant, l’hiver pique ! (rire)
- Nous avons donc pour projet de construire plusieurs bâtiments, qui serviront de lieux de vie communs, de logements et de garde-manger.
« Le moins que l’on puisse dire c’est que notre projet est clairement hyper local ! »
Au début de la conception du premier bâtiment, actuellement en chantier, nous sommes partis d’un constat simple : il nous faut une forte inertie thermique pour pouvoir stocker nos aliments et nos fromages.
Nous avons fait le choix d’un bâtiment semi-enterré, avec un garde-manger au rez-de-chaussée et une chambre/salle de vie à l’étage. Après quelques recherches, nous nous sommes inspirés d’un projet d’archéologie expérimentale de forge viking et avons utilisé des matériaux locaux :
- Tout d’abord on a creusé un grand trou d’environ 1,2m de profondeur, ça a été un sacré chantier…
- Nous avons réutilisé la partie la plus argileuse de notre sol pour créer une épaisse couche tassée imperméable sur toute la surface du trou.
- Il y a une carrière de roche calcaire abandonnée à moins de 15 minutes en voiture du terrain, on y a récupéré des matériaux que l’on a retaillé à la main (ou plutôt à la hachette !). Avec un mortier fait à partir de notre argile et de sable acheté à proximité, on a ensuite pu créer un mur au sous-sol le long de notre couche imperméable.
- La charpente, qui se prolonge également en pieux de fondation, est en bois de faux acacia. On l’a récupéré dans le village d’à côté en exploitant nous même une toute petite parcelle de forêt ! On a calciné la base des pieux enterrés pour les rendre plus résistants et durables face à l’eau.
- Enfin pour la toiture en chaume on est allé faucher des roseaux à quelques kilomètres du terrain, avec une vraie faux ! (rire)
En tout cas, le moins que l’on puisse dire c’est que notre projet est clairement hyper local !
« Auto-construire réserve quelques difficultés. »
Bon en vérité le chantier est toujours en cours, on n’a pas encore fini le muret du rez-de-chaussée enterré… (soupir)
Avec l’hiver qui arrivait on a eu d’autres priorités à gérer : faire des stocks de nourriture, s’occuper des bêtes, etc.
Auto-construire réserve quelques difficultés, surtout dans notre cas où on fait tout nous même avec très peu de moyens financiers.
Déjà tout est très nouveau, on n’a aucune formation dans ce domaine donc forcément on fait des erreurs. C’est aussi très compliqué pour nous d’estimer le temps réellement nécessaire à chaque étape. Et puis, tout n’est pas très bien documenté, le fauchage de roseaux par exemple.
Les conditions météos du chantier sont rudes également :
- En été le petit barnum ne nous protège que trop partiellement et on ne peut pas travailler quand le soleil tape trop fort.
- Quand il pleut beaucoup, notre trou se rempli d’eau et puisque l’argile en fond de fouille est très imperméable, on se retrouve avec une super piscine en plein hiver… et un chantier à l’arrêt pendant une ou deux semaines le temps que toute l’eau s’évacue… (rire/soupir)
« Les constructions traditionnelles étaient en réalité souvent plus économes en énergie, en matière. »
Mais auto-construire est aussi très enrichissant et très satisfaisant, on apprend beaucoup !
Et puis notre projet nous revient à un prix défiant toute concurrence : notre conception va nous permettre d’avoir un bâtiment de presque 45m2 au rez-de-chaussée (et un peu moins à l’étage avec la pente du toit) pour même pas 500 euros !
J’aime aussi comprendre comment les choses étaient faites avant. Je me suis fait la réflexion que les constructions traditionnelles étaient en réalité souvent plus économes en énergie, en matière…
J’ai le sentiment que dans l’éco construction on n’invente plus grand-chose aujourd’hui : on se contente essentiellement de redécouvrir des technologies anciennes tombées dans l’oubli.