Nous allons présenter ici quelques essais de laboratoire parmi les plus couramment utilisés dans le domaine de la construction terre crue.
Il existe deux types d’essais de laboratoire : ceux s’inscrivant dans ce que l’on peut appeler une approche « matériau », et ceux s’inscrivant dans une approche « performancielle »:
- Dans le cas de l’approche matériau on cherche à obtenir des informations sur la nature de ce dernier (teneur en argile, …), éventuellement sur ses propriétés (plasticité, …), afin d’en déduire de futures performances (risque de retrait – gonflement, …).
- L’approche « performancielle » quant à elle permet d’étudier directement les performances des éléments terre mis en œuvre.
Contrairement aux essais sensoriels, qui donnent accès à des données « qualitatives », les essais de laboratoires permettent d’obtenir des données « quantitatives » plus précises sur la terre. Cependant, ces derniers sont également plus chronophages et onéreux.
En amont d’un chantier terre, la nécessité et la pertinence des essais font l’objet de débats. Selon les techniques mises en œuvre, l’expertise des intervenants et le contexte du chantier, des essais sensoriels menés par un expert pourraient-ils être suffisants pour valider la convenance d’une terre ?
Les essais de laboratoire : approche « matériau »
Dans cette approche, on vient tester le matériau terre en lui-même.
Ces essais sont issus des normes géotechniques françaises. Ils sont, par exemple, traditionnellement utilisés lors de travaux routiers. Voici quelques exemples :
> Granulométrie
Cet essai est encadré en France par la norme géotechnique NF EN ISO 17892-4 : 2018. L’objectif de ce test est de déterminer la répartition granulaire de la terre en termes de diamètre de grains pour la portion supérieure à 63 µm.
La terre est initialement lavée à l’eau avec un tamis de 63 µm, séchée à l’étuve puis passée à travers plusieurs tamis de diamètres allant d’environ 50mm à 63 µm. Enfin, on pèse le « refus » (= ce qui n’est pas passé au travers des mailles) de chaque tamis.
Ces informations permettent de tracer une courbe « granulométrique » qui étudie la variation du « passant » (= ce qui est passé au travers des mailles du tamis) en fonction du diamètre des grains.
> Sédimentométrie
Cet essai est encadré en France par la norme géotechnique NF EN ISO 17892-4 : 2018. L’objectif de ce test est de déterminer la répartition granulaire de la terre en termes de diamètre de grains pour la portion inférieure à 63 µm.
Un échantillon de terre mélangé à un défloculant (= solution permettant de garantir une bonne séparation des grains) est introduit dans une grande colonne d’eau.
A intervalle de temps régulier et précis on vient mesurer la densité du mélange à l’aide d’un densimètre : cette dernière diminue progressivement jusqu’à atteindre la densité de l’eau puisque les particules en suspension chutent, d’abord les plus grosses puis les plus petites, au fond du contenant.
Quelques hypothèses et calculs permettent de tracer une courbe granulométrique pour la fraction de terre inférieure à 63 µm.
L’essai granulométrique et la sédimentométrie permettent ensemble d’obtenir une courbe granulométrique complète.
> Valeur au Bleu des Sols (VBS)
Cet essai est encadré en France par la norme géotechnique NF P94-068 : 1998. L’objectif de ce test est d’estimer la quantité et l’activité des argiles présentes dans le sol.
Au cours de ce test, on cherche à « saturer » les argiles du matériau étudié avec du bleu de méthylène.
Dans un premier temps on prépare une solution d’eau et de sol, homogénéisée de façon continue grâce à un agitateur.
On ajoute le bleu très progressivement, en déposant à chaque étape une petite goutte de solution sur un papier blanc : lorsqu’une tâche bleue caractéristique apparaît on sait que les argiles sont saturées.
On détermine ainsi la VBS (Valeur au Bleu des Sols), c’est-à-dire la masse de bleu adsorbé par 100g de terre.
Les essais de laboratoire : approche « performancielle »
Dans cet approche, on vient tester un élément fabriqué avec la terre crue. Il n’existe pour le moment pas de consensus scientifique concernant les protocoles de ces essais.
Les protocoles utilisés sont généralement inspirés des normes propres au béton de ciment coulé et à la terre cuite. Voici quelques exemples :
> Essai de compression simple
On comprime dans le sens de la hauteur un échantillon (cylindre, prisme, brique, …) issu du chantier ou produit spécifiquement pour les besoins du test, tout en garantissant au mieux une bonne représentativité avec les éléments produits sur chantier.
On cherche à connaître la force à laquelle l’éprouvette va rompre afin de déterminer la résistance à la compression (Rc) du matériau terre. Cette valeur peut ensuite être utilisée pour dimensionner l’ouvrage et s’assurer de la pérennité de la structure.
> Essai de cisaillement du plan de collage
On maçonne 3 blocs de terre crue à l’aide d’un mortier en respectant la même formulation et la même épaisseur que celui mis en œuvre par les maçons sur chantier.
On vient appuyer sur le bloc du milieu, laissé sans support dans le vide, tout en comprimant l’ensemble maçonné.
Cet essai est utilisé pour étudier la résistance en cisaillement d’un mur maçonné (en adobe ou en BTC dans le cas de la terre crue). Les valeurs obtenues peuvent notamment être utilisées pour dimensionner l’ouvrage face au risque sismique.
