Lors de la construction d’un bâtiment, la terre creusée lors du terrassement est mise de côté. Bien que parfois réutilisée sur ce même chantier en aménagement ou en remblais, il est souvent nécessaire d’en évacuer tout ou partie.
Encombrante et lourde, elle est alors considérée comme un « déchet ». Pourquoi ? Comment valoriser cette terre ? Les réponses dans cet article.
1/ Le terrassement, 1ère étape dans la construction d’un bâtiment.
Lorsque l’on construit un bâtiment, l’une des premières étapes est celle du terrassement.
A quoi sert le terrassement ?
Cette étape permet de garantir un sol de niveau égal et de densité uniforme avant la mise en place des fondations. Elle permet ainsi d’éviter tout problème de stabilité pour le futur ouvrage.
On parle aussi d’excavation, car on vient généralement creuser le sol et mettre de côté la terre présente en trop : cette terre est appelée terre « excavée », ou encore terre de « déblais ».
Les travaux d’excavation sont très variables d’un chantier à l’autre, de même que les volumes de sol extraits (terre, matière organique, roche, …). Ces volumes sont particulièrement conséquents lors de la création de niveaux enterrés tels que les parkings, par exemple.
Où est le « problème » ?
D’après une étude datant de 2014, le secteur du BTP était à lui seul responsable de 230 millions de tonnes de déchets en France. 80% environ étaient des déchets inertes (voir encart en fin d’article sur les différents types de déchets du BTP), dont une grande majorité de terre et de gravats issus des travaux de terrassement.
Ces matériaux dits « géo-sourcés » représentent donc une part conséquente des déchets du secteur du BTP, pesant lui-même lourd dans la balance des déchets français.
2/ La gestion des terres excavées
Les différentes étapes
Le long voyage des terres de déblais est composée de plusieurs étapes clés :
- Diagnostic ;
- Extraction ;
- Transport ;
- Collecte et tri ;
- Valorisation ou enfouissement.
La valorisation
Les terres peuvent être valorisées sur le site même de l’extraction, sur un autre site de construction ou dans une carrière. Les principaux modes de valorisation sont le remblais routier ou paysager, le remblais de tranchée ou la sous-couche routière.
En question : le transport et le stockage
Quand elle ne sont pas réutilisées, elles sont stockées dans des décharges malheureusement de plus en plus saturées.
L’énergie utilisée lors des différentes étapes de leur gestion nous pousse aujourd’hui à questionner de nouvelles méthodes de valorisation.
3/ Le cas des travaux du Grand Paris Express
Récemment, la question des terres de déblais est revenue en force sur le devant de la scène avec la construction du Grand Paris Express, un nouveau métro automatique.
Ce dernier proposera quatre nouvelles lignes aux franciliens souhaitant se déplacer entre des banlieues à présent réunies au sein de la Métropole du Grand Paris, une entité née en 2016 après des années de concertations.
En tout, on prévoit qu’environ 40 millions de tonnes de déblais seront extraites des chantiers du Grand Paris Express, un projet d’ailleurs très critiqué pour son poids économique (budget de 35 milliards d’euros) et son impact environnemental.
Ce volume colossal de terre, réparti sur les dix années de travaux, viendra s’ajouter aux quelques dizaines de millions de tonnes générées chaque année par le BTP.
Plusieurs solutions vont être proposées pour faire face à ces montagnes de déblais arrachées du sol, d’autant que la Société du Grand Paris s’est donnée pour objectif d’atteindre 70% de réutilisation des terres excavées. Cette objectif se veut conforme aux objectifs européens de 2020 en termes de valorisation des déchets non dangereux du BTP.
Parmi ces projets de valorisation, nous pouvons citer l’aménagement du parc urbain de Sempin des communes de Chelles et de Montfermeil, ou encore l’utilisation de ces terres sur d’autres chantiers de proximité.
Une partie de ces déblais sera également répartie au sein de décharges, de carrières et d’espaces de traitement des déchets dans les villes alentours.
Le parc des Buttes – Chaumont : un projet « sorti de terre »
Cette question des terres de déblais est loin d’être récente, voici par exemple une anecdote intéressante : le parc parisien des Buttes-Chaumont a été créé au XIXe siècle à partir de près de 800 milles m3 de terres de déblais réparties sur une ancienne carrière de gypse et de pierre meulière ainsi transformée en parc urbain.
4/ La construction en terre comme piste de valorisation plus « noble »
Des projets de revalorisation des terres excavées tels que Cycle Terre ont vu le jour en 2018. Ce projet propose de revaloriser les terres de déblais sous la forme de matériaux de construction : BTC (Briques de Terre Comprimée), enduits et panneaux de doublage en terre crue.
« Ce qui est aujourd’hui considéré comme un rebut inutilisable et encombrant peut en réalité devenir une ressource considérable. Dans les années à venir, il est envisageable de construire des millions de mètres carrés en réemployant ces terres de chantier plutôt que de les stocker. Développer des projets en terre : l’enjeu est aujourd’hui politique, économique et social. C’est sous une impulsion citoyenne que le développement d’une filière de valorisation, de production et de mise en œuvre de ce matériau à grande échelle pourra voir le jour. »
Source : cycle-terre.eu
La construction en terre crue émergera peut-être à l’avenir comme une solution courante de valorisation de ces terres d’excavation en fonction de leurs caractéristiques : BTC, enduits, briques de terre crue, pisé, adobe, … les techniques ne manquent pas !
Dans tous les cas, la volonté de limiter la surcharge des décharges par des matériaux géo-sourcés sera une alliée de poids dans le développement de la construction en terre crue en France.
Pour information :
Les différents types de déchets du BTP d’après le Code de l’environnement :
- Les déchets non dangereux inertes : déchets qui ne subissent aucune modification physique, chimique ou biologique importante et qui ne présentent aucun risque d’un point de vue sanitaire et environnemental.
Exemple : déchets de béton, de briques, de tuiles, terres et roches de déblais, …
- Les déchets dangereux : déchets présentant une ou plusieurs des 15 propriétés de danger définies au niveau européen (inflammables, toxiques, …). Ils font l’objet de règles de gestion particulières afin de limiter au mieux leur impact environnemental et sanitaire.
Exemples : bois traités aux métaux lourds, huiles usagées, agrégats d’enrobés contenant de l’Amiante, …
- Les déchets non dangereux non inertes : déchets ne rentrant dans aucune des deux catégories présentées précédemment.
Exemples : biodéchets, verre, plastique, bois, …